jeudi 16 juillet 2009

Un décor de fin du monde


Elle avait un bâton de dynamite dans une main, une destination dans l'autre. On lui avait déjà dit: "Il faut régler ses problèmes à la source", ce qu'elle ferait dans les prochaines minutes, sans gêne, sans même trop y penser. Un entrepôt rouillé dans un endroit anonyme pour lui servir de refuge, pas de complice, pas de regrets, que son regard qui dardait vers l'avenir avec fureur.

Elle secoua sa tignasse, alluma la mèche, lança le bâton, pouf. C'était fini. Une courte vengeance, une satisfaction minimale. La course commençait maintenant, à cette seconde précise, sans un coup d'oeil pour la catastrophe qu'elle avait créée en se débarrassant de la dynamite: sang, verre brisé, odeur de cheveux brûlés, fumée opaque. La bibliothèque ne tenait plus debout, les livres gisaient sur le sol, la fenêtre ne retenait plus la pluie, le bureau n'existait plus, ni la chaise, ni celui qui l'occupait quelques secondes auparavant. Elle n'avait pas eu besoin de regarder pour savoir, pour imaginer la scène dans sa tête, avec les cordons de la police, les enquêteurs, les journalistes avec leurs gueules de chiens affamés.

Elle était déjà loin, elle avait balayé tout ça d'un geste de la main, léger comme l'air. Elle courait, sans reprendre son souffle, pour atteindre cet entrepôt rouillé dans un endroit anonyme, où elle pourrait peut-être profiter d'une seconde de paix, avant de recommencer sa course.

mercredi 15 juillet 2009

Une brique dans un fanal


Voilà, mes espoirs sont déçus. L'idée amenée à la page 23 constitue l'ossature du texte (!) et tout est à reprendre du début. Je dois être la fille la plus efficace de la Terre, tout de suite. Je me refuse le découragement et la frustration, sinon, je vais m'écrouler comme une vulgaire guenille.

Je focalise et mets mon cerveau en mode marathon. Sandwich aux cretons, un deuxième sac pour rapporter tous mes livres de la bibliothèque, mes sandales, un élastique rose et toute ma concentration. J'irai m'enfermer au 5290 toute la journée, les yeux rivés sur mon écran, les doigts en feu sur mon clavier.

lundi 13 juillet 2009

Lundi 13

Mes yeux sont bouffis par trop de réveils brusques au son du cadran. J'ai rêvé qu'il ne fallait pas couper le pain des invités avec une scie ronde sur une planche de cèdre, et je ne comprends pas comment j'ai fait pour imaginer une chose semblable dans mon sommeil.

Les mauvaises nouvelles viennent s'échouer dans mon oreille, au rythme d'une ou deux par jour. Elles me touchent de loin et je dessine des zèbres baroques pour consoler les petits animaux. Je serai bientôt fixée sur mon espoir de vacances: j'ai peut-être tout faux et dans ce cas-là, adieu probables moments de détente au mois d'août. La rencontre de demain matin décidera de l'issue de mon été, en espérant que ce soit positif. D'ici là, je retiens mon souffle, j'angoisse un peu et j'irai dépenser au centre commercial, comme si je n'y passais pas déjà assez de temps.

vendredi 10 juillet 2009

"Je vis sur la planète solitude"


Je suis dans une bulle hors du temps et le réel ne m'atteint plus. Je ne sais plus rien de la civilisation, je navigue en moi-même, loin de tout. Je soupe à dix heures du soir, je regarde la voisine aller jeter la crotte de son chien dans le container, j'attends d'aller voir ce funambule qui ne me sortira même pas de mon monde fabulé. Je me demande pourquoi la crème remonte à la surface de mon café au lieu de s'y dissoudre, pourquoi mes écouteurs me serrent la tête alors qu'elle est si petite. Je pense exactement comme Bambi, exactement. Je m'accroche au bonheur d'arriver à la fin de tout, temporairement, avant de pouvoir replonger dans un autre type d'écriture. Je cesse la relecture, j'irai dès cet instant me perdre en ces lieux d'errance, une promenade comme une autre aux frontières de l'imaginé.

jeudi 9 juillet 2009

Crise à propos des graves injustices de la vie

Oh, bien sûr, à quoi m'attendais-je? Je retourne au boulot aujourd'hui et le soleil se pointe sauvagement le bout du nez, bien sûr, bien sûr. Il a plu pendant mes vacances, j'ai pu travailler, c'est bien. Tout de même, j'ai une furieuse pointe de jalousie pour ceux qui lézarderont au bord de la piscine, qui envahiront les terrasses, qui dégusteront l'apéro, qui feront crépiter leur bbq, pour ceux qui profiteront de la belle température, quoi. Pendant que moi, je changerai des virgules pour des parenthèses dans mon bureau et que je prendrai des photos jusqu'à neuf heures du soir, bien à l'abri du beau temps, congelée par l'air climatisé du centre d'achats.

mercredi 8 juillet 2009

La vie est bien faite

Un thé écossais, un bol de céréales avec des bananes et des fraises dedans et dans la boîte postale, un chèque du gouvernement, un autre de Bell et une lettre de cette amie qui habite si loin au nord, écrite sur du papier coloré qui sent la guidoune, vestige de nos collections absurdes du primaire. Ça part bien la journée. Ne reste plus qu'à me plonger dans la correction, encore.

mardi 7 juillet 2009

À défaut d'un coucher de soleil


Il a plu, ça oui.
Le fleuve est toujours beau, même si le ciel est gris. Il y a un couple d'aigles qui niche dans la falaise et qui plane au-dessus de l'eau, une fois de temps en temps. Les pivoines ont été massacrées par les averses. La belle porte verte, avec toutes ses fioritures, subit une cure de rajeunissement dans le garage avant de devenir rouge. La chambre d'en haut sent le bébé et je suis une matante rebelle qui apprend à sa nièce à faire des grimaces. La campagne, c'est cool. Et puis, j'ai vu passer ce bateau de croisière.